Le 11 novembre 2010, à Cancun, devant les cameras de journalistes internationaux, les représentants de 194 pays signèrent un accord international sur les moyens à prendre pour ralentir le réchauffement climatique, voulant ainsi effacer des mémoires le souvenir du fiasco de Copenhague.
Enfin, les nations du monde sont parvenues à un accord, peut-on lire de part et d’autres dans les médias du globe.
Rien de moins certain.
Avant de pavoiser, sachons que cette entente, encore en gestation, n’impose aucune cible contraignante, contrairement à celle de Kyoto. En fait, l’accord de Kyoto a été officieusement débouté lors de ces séances plénières car jugé trop encadrant. Pourtant, cette entente constituait un strict minimum nécessaire à la lutte contre les modifications du climat.
On a évoqué le vœu pieu de réduire la hausse de la température moyenne de la planète à 2°C au-dessus des niveaux préindustriels. Or, le texte de Cancun n’amène rien de nouveau sur le palier de réduction des émissions, considéré comme trop faible pour atteindre l’objectif de ces deux degrés maximums.
De plus, Cancun engage les pays développés à rapetisser leurs rejets carbones dans l’atmosphère… même si l’un des plus grands pollueurs de la planète, après la Chine, les États-Unis, vient de rejeter au Congrès une législation sur les gaz à effet de serre et utilise encore le charbon comme producteur d’énergie électrique dans nombre de ses États. En effet, les élus démocrates du centre du pays ont voté contre ce projet de loi malgré la présence d’un président plus écologiste issu de leur formation politique.
À Cancun, on constate que la pensée magique a prédominé sur la réalité.
Il y a la future mise en place du REDD (Reducing Emissions from deforestation and degradation), un mécanisme basé sur les principes du marché concocté pour équilibrer la pollution de GES du nord en sauvegardant ou plantant des arbres au sud. Ainsi, un grand pollueur américain pourra s’acheter bonne conscience en investissant dans un projet forestier au Brésil. Les « hics» sont que les vautours de la spéculation risquent de s’emparer de ce nouvel eldorado du carbone, qu’il sera difficile d’évaluer combien d’hectares de forêt il faut ensemencer pour contrecarrer les effets de milliards de tonnes de gaz à effet de serre et que les retards des dernières décennies dans ce dossier demandent des politiques beaucoup plus musclées. Alors, pas surprenant que la socialiste Bolivie ait refusé de signer l’accord.
Par ailleurs, l’idée du Fonds vert, malgré son avant-gardisme, semble être une invention creuse car aucune source de financement n’a été stipulée. On parle de taxes sur le transport ou les transactions boursières. Mais, chacun sait qu’en période de grave récession économique et de crise des dettes souveraines, plus précisément en Europe, de telles taxes sont inenvisageables car elles entraveraient le commerce déjà affaibli par la chute générale de la demande en Occident. Sans compter que la Chine et l’Inde verraient d’un mauvais œil une telle initiative pouvant nuire à leur développement économique.
Et, comble de ridicule, la Banque Mondiale se voit donner la gérance de cet éventuel Fonds pour une période de 3 ans! Ce Fonds, devant aider les pays en développement à pallier à leurs problèmes de développement socio-économique dans la déférence envers l’environnement, sera sous l’égide d’une organisation qui, depuis 30 ans, applique un diktat économique néolibéral sur les pays en difficulté en les obligeant à des privatisations des services publics, diminutions des salaires, déréglementations de l’économie avec comme conséquence le bilan socio-économique désastreux que l’on observe aujourd’hui avec la crise économique! La Banque Mondiale représente la dernière instance capable de gérer un tel Fonds vert car sa raison d’exister n’est pas la protection des habitats vivants, mais le bon déroulement du capitalisme sous la férule du marché.
Bref, l’entente de Cancun est aussi timide qu’incohérente.
On cherche à épater la galerie et à rassurer des citoyens désormais plus soucieux de l’écologie.
Cependant, la crise économique et les dissensions entre pays développés et en voie de développement enlèvent les moyens d’un véritable plan global sur l’atténuation du phénomène négatif des gaz à effet de serre.
Et déjà, à Kyoto, nous avions entendu ce refrain de quasi-consensus sur ce sujet. Avec les résultats que l’on connaît.
En fait, considérant qu’il faudrait 4 planètes terre pour suffire à la demande de toute la population si chaque être humain vivait comme un nord-américain, l’unique alternative demeure de réduire notre consommation, de revenir à l’essentiel, de privilégier la production locale et de modifier notre système économique selon une approche de développement durable plus respectueuse de l’environnement.
Peut-être que la crise économique amènera ces changements….
À Lire: En attendant le déluge…

Niveau de difficulté de texte selon Scolarius d’Influence Communication : 174 (universitaire)