Les erreurs de Poutine

Cet article a été publié dans Le Soleil de Québec, le 5 mars 2023

Il y a un peu plus d’un an a été déclenchée la guerre en Ukraine. Vladimir Poutine espérait une victoire rapide à la Blitzkrieg tout en prévoyant une réponse timorée des puissances occidentales face à l’agression.

Il s’est toutefois trompé dans ses calculs en ne tenant pas assez rigueur de certains éléments cruciaux dans son analyse stratégique.

Référons-nous ici à l’œuvre du général français André Beaufre qui a écrit de nombreux livres sur la stratégie et la guerre.

Selon Beaufre, qui s’inspire évidemment de grands théoriciens militaires comme Clausewitz, Sun Tzu ainsi que de sa grande expérience de la stratégie militaire, la guerre est en constante évolution et celui qui ne sait pas anticiper les changements techniques, scientifiques ou logistiques de son époque court inévitablement à sa perte.

Ainsi, le chef de l’État russe s’est engagé dans un conflit selon les méthodes du 20e siècle qui ne correspondent plus nécessairement à la réalité d’aujourd’hui tout en ayant pris du retard sur une modernisation essentielle de ses forces terrestres et aériennes, en raison notamment des sanctions économiques que la Russie a subies depuis l’invasion de la Crimée en 2014. Les nouvelles technologies et les armements à la fine pointe que l’Occident fournit à l’Ukraine par son appui indirect changent la donne et une simple invasion militaire par des blindés ou des frappes aériennes à l’ancienne ne conviennent apparemment plus à la réalité des conflits armés au 21e siècle. Voici la première erreur.

L’autre constatation que le général Beaufre met en évidence est l’importance de la stratégie indirecte qui se distingue de la stratégie directe se concentrant simplement sur le théâtre d’opération. Cette stratégie indirecte comprend notamment la manœuvre extérieure qui consiste à diviser la communauté internationale par des actions politiques, diplomatiques ou économiques avant et pendant l’invasion. Ici, le régime de Poutine souhaitait diviser l’Europe occidentale avec des menaces de coupures de gaz (plan qui n’a pas fonctionné et qui a été même profitable à l’OTAN avec de nouvelles demandes d’adhésion de la Finlande et de la Suède) et il comptait également sur une alliance solide avec la Chine dans le conflit qui ne s’est finalement jamais concrétisée. Ce fut la deuxième erreur.

Enfin, toujours selon Beaufre, des forces armées plus puissantes ne garantissent pas la victoire si la stratégie employée n’est pas la bonne. Les tactiques de guérilla par la résistance adverse peuvent être très efficaces contre un ennemi possédant un armement supérieur, surtout si le conflit s’éternise comme présentement en Ukraine. Le meilleur exemple historique demeure la guerre du Vietnam. Voilà la troisième erreur.

Le général Beaufre souligne que la «stratégie totale» moderne doit tenir compte efficacement de tous les aspects pouvant mener à la victoire (forces militaires, certes, mais aussi la diplomatie, les pressions économiques, le jeu politique et même la manipulation psychologique) et ne se résume pas uniquement aux coups de fusils ou aux tirs d’artillerie. Vladimir Poutine vient sûrement de l’apprendre à ses dépens…

Photo de cottonbro studio: https://www.pexels.com/fr-fr/photo/texte-de-non-guerre-en-noir-et-blanc-3831760/

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